À propos des auteures

Marni C. Wiseman, MD, FRCPC
La Dre Marni C. Wiseman a commencé à pratiquer la dermatologie à Winnipeg (Manitoba) en 2001. Elle enseigne à titre de professeure agrégée et chef de section en dermatologie à la Faculté de médecine de l’Université du Manitoba, la Dre Wiseman passe la plupart de ses journées à la clinique SKiNWISE DERMATOLOGY, un cabinet médical privé, où elle est directrice médicale.
Les domaines d’intérêt clinique et de recherche de la Dre Wiseman comprennent le psoriasis, la dermatite atopique, l’hidradenitis suppuritiva, l’acné et la dermatologie esthétique. Elle est chercheuse principale pour le groupe Wiseman Dermatology Research et a participé à des centaines d’essais cliniques.
La Dre Wiseman supervise et encadre fréquemment des étudiants en médecine et des résidents. Elle a publié de nombreux articles dans les domaines des maladies inflammatoires de la peau, de la photodermatose et de la malignité cutanée.
La Dre Wiseman est très active au sein de la communauté et participe notamment au programme Sun Awareness de l’Association canadienne de dermatologie. Elle est rédactrice en chef du Journal of Cutaneous Medicine and Surgery, et elle a été présidente du Skin Cancer Disease Site Group à Action Cancer Manitoba pendant 15 ans. La Dre Wiseman organise régulièrement des cliniques de dépistage du cancer de la peau dans les régions rurales du Manitoba. Elle a fait l’objet de nombreux reportages et présente régulièrement des exposés lors de réunions et de congrès nationaux et internationaux.

Ashley O’Toole, MHSc, MD, FRCPC
La Dre O’Toole est dermatologue au SKiN Centre for Dermatology de Peterborough, en Ontario, où elle est également assistante à la recherche dans le cadre de multiples essais cliniques. Elle est professeure auxiliaire à l’Université Queen’s et elle participe à la formation des étudiants en médecine et des médecins résidents. Après avoir obtenu une maîtrise en sciences de la santé et en communication comportementale à l’Université Ryerson de Toronto (Ontario), la Dre O’Toole a obtenu un diplôme en médecine de l’Université McMaster de Hamilton, en Ontario. Elle a terminé sa résidence en dermatologie à l’Université d’Ottawa, à Ottawa, en Ontario. La Dre O’Toole est l’auteure ou la co-auteure de 15 publications et participe à environ 30 essais cliniques portant sur la dermatite atopique, le psoriasis, l’alopécie, l’acné et le vitiligo.
Supplément Spécial, Actualité Dermatologique au Canada, Juin 2021
Comprendre l’effet cumulatif du psoriasis tout au long du cycle de vie : répercussions sur la prise en charge des patients
La reconnaissance croissante du fardeau du psoriasis sur la qualité de vie des patients et l’accès à des traitements plus efficaces sont des facteurs qui ont fait remonter la barre de plusieurs crans dans la prise en charge des patients atteints de psoriasis.

Le psoriasis est une maladie inflammatoire chronique de la peau qui touche environ 2 % de la population à l’échelle mondiale. Parmi les sous-types de la maladie, le psoriasis en plaques est la forme la plus courante, puisqu’elle compte pour 90 % des cas1. Cette maladie est associée à de nombreuses comorbidités. Par ailleurs, elle est désormais largement reconnue comme un trouble inflammatoire à médiation immunitaire.
L’ÉVOLUTION DU FARDEAU DU PSORIASIS TOUT AU LONG DE LA VIE :
UNE NOUVELLE FAÇON D’EN COMPRENDRE LES RÉPERCUSSIONS
Le fardeau du psoriasis n’est pas que cutané
Le lien entre le psoriasis et de nombreuses comorbidités a clairement été établi (Figure 1). Selon une vaste analyse rétrospective, jusqu’à 41 % des patients atteints de psoriasis sont éventuellement atteints de rhumatisme psoriasique8. Une méta-analyse menée en 2019 auprès de patients atteints de psoriasis a fait état d’une prévalence plus conservatrice du rhumatisme psoriasique, soit 20 %, et d’une probabilité plus élevée de cette affection chez les patients atteints de psoriasis d’intensité modérée ou grave9. Les lésions cutanées précèdent généralement l’atteinte au niveau des articulations, soit 12 ans en moyenne10. Les patients atteints de psoriasis présentent également des taux accrus d’hyperlipidémie, d’hypertension, de coronaropathie, de troubles gastro-intestinaux, de stéatose hépatique non alcoolique (SHNA), de lymphomes ou autres néoplasmes, ainsi que de diabète de type 2. Les données probantes indiquent que le psoriasis est en soi un facteur additionnel de risque d’infarctus du myocarde et d’accident vasculaire cérébral1.
Une étude basée sur la population a confirmé l’association entre le psoriasis et le syndrome métabolique. Plus le psoriasis est grave, plus cette association est étroite. Les patients atteints d’une forme grave de psoriasis présentent également un risque plus élevé de mortalité cardiovasculaire (CV), indépendamment des facteurs de risque habituellement en cause12. Le psoriasis est également associé à une prévalence élevée d’anxiété (30 %), de troubles dépressifs (60 %) et de risques de suicide (10 %)11.
Dans une étude menée auprès de 166 patients qui portait sur les conséquences du psoriasis en matière de préjugés et de qualité de vie (QdV), les chercheurs ont noté que la QdV chez les personnes atteintes de psoriasis ne dépendait pas des paramètres sociodémographiques, mais qu’elle était plutôt fortement corrélée à deux formes de réactions aux préjugés, soit la « sensibilité aux opinions des autres » (p = 0,0030) et les « attitudes positives » (p = 0,0115)13.
L’incidence globale du psoriasis sur la QdV est comparable à celle des maladies cardiaques, du diabète et du cancer12. Elle se répercute sur tous les aspects de la vie des patients. Dans une étude qualitative portant sur l’expérience vécue par des patients atteints de psoriasis, 98 % des répondants ont signalé une incidence sur leur vie affective, 94 % sur leurs interactions sociales, 70 % sur leur vie familiale, 68 % sur leur carrière professionnelle, 38 % sur leurs capacités physiques et 21 % sur leur capacité d’apprentissage13. Le psoriasis a même été associé à une baisse de revenus proportionnelle à la gravité de la maladie. L’incidence de faible revenu (< 30 000 $) est nettement plus élevée chez les patients atteints d’une forme grave que chez ceux atteints d’une forme bénigne de la maladie (P = 0,0002). En outre, un nombre beaucoup plus élevé de patients atteints d’une forme grave de psoriasis (17 %), par rapport à ceux qui sont atteints d’une forme plus bénigne (6 %), ont répondu que le psoriasis les empêchait d’avoir un travail rémunéré (P = 0,01)14. Ensemble, ces facteurs peuvent se traduire par l’« incapacité d’une personne atteinte de psoriasis à atteindre son plein potentiel »5.
Effet cumulatif du psoriasis tout au long du cycle de vie
Le fardeau global du psoriasis n’est pas statique, il s’accumule tout au long de la vie d’un patient. Le concept d’effet cumulatif sur la vie du patient (ECVP) est le reflet de la dimension longitudinale de cette incidence. Décrit initialement en 201016, l’ECVP tient pour acquis que la santé d’une personne est tributaire d’une gamme de déterminants sociaux, environnementaux et économiques tout au long de sa vie. Ces déterminants ont non seulement une incidence sur l’état de la maladie, ils se répercutent également sur la sensation générale de bien-être et la QdV. Comme le montre la Figure 2, un contrôle sous-optimal du psoriasis et de facteurs comme les comorbidités physiques, le dysfonctionnement psychosocial et le traumatisme intensifie le fardeau de la maladie dans son ensemble, ce qui se répercute sur l’ECVP d’une personne.
Puisque ce fardeau est cumulatif, le psoriasis se prête particulièrement bien à une analyse fondée sur l’ECVP. Les études qui ont été effectuées laissent entendre que l’ECVP est le résultat d’une interaction entre (A) le fardeau des préjugés, les comorbidités physiques et psychologiques ainsi que (B) les stratégies d’adaptation et les facteurs externes (Figure 3).
Si un patient atteint de psoriasis présente une comorbidité connexe, comme une maladie intestinale inflammatoire, l’ECVP associée à la MII peut s’ajouter à celui qui est associé au psoriasis17.
Pour identifier les patients atteints de psoriasis qui présentent un risque plus élevé d’ECVP, il faut tenir compte de plusieurs facteurs cliniques et psychosociaux, notamment18:
- Âge précoce au moment de l’apparition des symptômes
- Gravité de la maladie
- Comorbidités significatives
- Préjugés
- Impact négatif sur le travail ou la profession
- Personnalité pessimiste
- Manque de soutien social
- Faibles capacités d’adaptation
- Comportements à risque
Comme illustré ci-dessous, la vulnérabilité globale à l’ECVP est une question d’équilibre entre différents facteurs de risque pour le patient, à son degré personnel de vulnérabilité et aux mécanismes d’adaptation à sa disposition (Figure 4). Les patients qui n’ont pas le soutien de leur famille, de leurs amis, d’une équipe de soins de santé multidisciplinaire ou de groupes de soutien sont ceux qui sont le plus vulnérables à l’ECVP. La compréhension de l’ensemble des facteurs de risque auxquels chaque patient est confronté peut aider les cliniciens à identifier ceux qui sont plus vulnérables à l’ECVP et à prendre des décisions thérapeutiques plus tôt dans la progression de la maladie19.

Figure 4. Interaction entre les facteurs de risque et des mécanismes d’adaptation dans la vulnérabilité à l’ECVP
Cas de patients atteints de l’ECVP
Les deux cas ci-dessous décrivent de quelle façon les répercussions négatives contribuent à l’ECVP et de quelle façon un traitement efficace peut empêcher cette déficience de s’aggraver.
SARA, qui a maintenant 31 ans, a reçu un diagnostic de psoriasis en plaques de grave intensité lorsqu’elle avait 14 ans (score BSA de 12 %). Bien que l’intensité des plaques soit plus grave au niveau du cuir chevelu, elles sont également présentes sur d’autres parties du corps, notamment ses mains, ses bras et ses jambes. Pendant son adolescence et au début de l’âge adulte, elle a été soumise à diverses formes de discrimination, comme des camarades de classe qui évitaient tout contact physique avec elle ou des commis qui refusaient de lui permettre d’essayer des vêtements. Cette situation a finalement contribué à un état dépressif et anxieux suffisamment grave pour l’empêcher de nouer des amitiés et des relations étroites. Après avoir obtenu un diplôme d’un collège communautaire, Sara a continué à vivre chez ses parents. Depuis, elle travaille à temps partiel comme aide-comptable à domicile. Après l’échec d’un traitement et une intolérance aux effets secondaires du méthotrexate et de la cyclosporine, elle a refusé de suivre d’autres traitements et son état dépressif s’est intensifié.Sur l’insistance de sa famille, elle est finalement retournée consulter un dermatologue. Il lui a prescrit un médicament biologique. Les lésions cutanées ont complètement été éliminées en 11 semaines, et son état a été maintenu ou presque entièrement maintenu alors qu’elle continuait d’observer le traitement biologique (scores BSA 0 à 0,5 %, score > PASI 90, amélioration de 12 points selon l’indice IQDL d’évaluation de la qualité de vie dermatologique, par rapport à 0 au départ). Sara s’efforce de changer les comportements d’évitement qu’elle avait adopté. Pour la toute première fois dans sa vie, elle a un petit ami, et elle termine ses études en comptabilité.
SAMIN, 42 ans, a développé un psoriasis en plaques étendu à l’âge de 18 ans. Pendant ses études universitaires, il a été victime de harcèlement à cause du psoriasis. Il est maintenant obèse (IMC de 32) et a développé un problème de consommation d’alcool. Il a abandonné
ses études en génie. Marié et père de deux enfants, il veille aux besoins de sa famille en travaillant dans l’atelier de réparation d’appareils électroménagers de son père. Un diagnostic de rhumatisme psoriasique, puis de diabète, a conduit Samin à devenir moins actif et à éviter sa famille et ses amis. Après sa séparation, sa consommation d’alcool est devenue un problème très important. Il a été admis à l’hôpital en raison d’un état hyperglycémique hyperosmolaire. Il habite maintenant avec un cousin et bénéficie de soutien en santé mentale. Il retrouve peu à peu un état de bien-être mental. Il a récemment commencé à observer un traitement biologique antipsoriasique, un régime alimentaire et un programme d’exercices adaptés au diabète. Il a constaté une amélioration par rapport au psoriasis, au diabète et à son état dépressif. Tout en étant satisfait des progrès réalisés, il regrette de ne pas avoir commencé à observer un tel traitement plus tôt.
ÉLIMINATION COMPLÈTE : NOUVEL OBJECTIF THÉRAPEUTIQUE
L’évolution des traitements biologiques disponibles pour combattre le psoriasis d’intensité modéré ou grave a permis de réévaluer les objectifs du traitement et de viser l’élimination complète du psoriasis ainsi qu’une amélioration de l’état de santé mentale et de la capacité de fonctionnement psychosocial. Une élimination complète ou presque complète est considérée comme étant un objectif réalisable pour la plupart des patients. De cette façon, il est possible d’atteindre un objectif plus ambitieux, soit une amélioration de la QdV et une réduction potentielle de l’ECVP19.
Les implications pour une élimination complète
L’élimination complète contribue à l’amélioration du bien-être subjectif d’une personne. Dans le cadre d’une étude menée dans 31 pays auprès de plus de 8 000 patients atteints de psoriasis en plaques d’intensité modérée ou grave, les personnes interrogées ont énuméré les activités auxquelles elles avaient le plus hâte de participer dès l’élimination complète de leurs lésions cutanées. Les activités que la plupart des personnes considèrent comme routinières, comme les câlins, les relations sexuelles, les rencontres, les visites au gymnase et la participation à des sports de plein air, dominaient la liste20.
Il a été démontré que les traitements permettant d’obtenir une élimination complète ou presque complète des lésions cutanées améliorent la qualité de vie des patients. De nombreuses études ont démontré que les traitements biologiques peuvent aider les patients à atteindre un indice DLQI de 0/1, ce qui indique que les patients ne ressentent que peu ou pas d’impact sur leur qualité de vie liée au psoriasis pendant leur traitement (Tableau 1). En outre, l’amélioration de la qualité de vie signalée par les patients est plus importante chez les patients ayant obtenu une élimination complète ou presque complète des lésions cutanées. Dans le cadre de trois études distinctes portant sur le lien entre l’indice DLQI (0/1) et la réponse PASI chez les patients traités par ixékizumab, brodalumab ou sécukinumab, un nombre considérablement plus élevé de patients ont signalé un indice DLQI de 0/1 lorsqu’ils avaient obtenu une élimination complète (indice PASI : 100), par rapport à ceux ayant obtenu une élimination presque complète (indice PASI : 90)21,22,23.

Tableau 1. Pourcentage de patients ayant déclaré un indice DLQI de 0/1 pour divers produits biologiques à la 12e ou 16e semaine ou à la 48e ou 52e semaine24-29
L’élimination complète ne suffit pas : son maintien est tout aussi important, d’autant plus que le psoriasis est une maladie chronique. Dans le cadre d’une étude portant sur des patients atteints de psoriasis qui étaient traités par un agent biologique, on a observé une augmentation disproportionnée (c.-à-d. détérioration) du score selon l’indice DLQI par rapport à l’évolution de l’état de leur peau chez les patients qui ont interrompu le traitement après avoir obtenu une bonne réponse (définie par un score PASI 75) (Figure 5)30.

Figure 5. Le maintien de la réponse est essentiel, car les rechutes sont associées à une aggravation disproportionnée de l’indice DLQI
Traitement par cible
Le concept de « traitement par cible » consiste à fixer les objectifs du traitement, à choisir le traitement approprié, à surveiller régulièrement la réponse au traitement et à en ajuster le plan au besoin. Cette approche trouve un appui dans de nombreuses lignes directrices cliniques sur le psoriasis (Tableau 2), les cibles thérapeutiques et les stratégies de prise en charge devenant plus ambitieuse à mesure que les traitements continuent d’être de plus en plus efficaces.

Tableau 2. Cibles thérapeutiques proposées par les lignes directrices cliniques sur le psoriasis les plus récentes
Parallèlement à ces lignes directrices, des essais cliniques ont révélé une tendance à la hausse dans l’utilisation des critères d’évaluation PASI 90 et PASI 100 au cours des dix dernières années, tandis que le recours des cibles inférieures utilisées antérieurement, soit PASI 50 et PASI 75, a diminué au courant de la même période36.
Le bon traitement au bon moment
Le bon traitement utilisé au bon moment fait plus qu’atténuer les symptômes, il peut également avoir un impact sur la vie dans son ensemble16. La Figure 6 illustre de quelle façon une intervention précoce peut atténuer l’ECVP attribuable aux symptômes, aux comorbidités, aux préjugés et aux séquelles psychologiques associés au psoriasis d’intensité modéré ou grave16. Une étude systématique laisse entendre qu’un traitement efficace contre le psoriasis peut contribuer à soulager l’état dépressif37, ce qui crée à son tour les conditions requises pour améliore la productivité au travail.
Ainsi, une bonne prise en charge des comorbidités et la collaboration entre les différents spécialistes, ainsi que la mobilisation des ressources communautaires, sont des éléments essentiels pour combattre la maladie et optimiser les chances de succès24.
TRAITER PAR CIBLE : DONNÉES PROBANTES EN FAVEUR DES NOUVEAUX TRAITEMENTS BIOLOGIQUES
Peut-on atteindre la cible sans produits biologiques?
Les traitements systémiques classiques sont souvent prescrits aux patients atteints de psoriasis d’intensité modérée ou grave et ce sont souvent les traitements que les payeurs acceptent de rembourser, malgré leurs lacunes en matière d’innocuité, d’efficacité et de durabilité de l’effet (Tableau 3).

Tableau 3. Traitements systémiques classiques prescrits aux patients atteints de psoriasis d’intensité modérée ou grave
Psoriasis et traitements biologiques
Alors que les premiers traitements biologiques contre le psoriasis étaient axés sur les inhibiteurs du TNF, les agents biologiques qui inhibent l’IL-23 (tildrakizumab, guselkumab, risankizumab) et
l’IL-17 (sécukinumab, ixékizumab, brodalumab) offrent une médiation immunitaire plus ciblée et un meilleur profil risques-avantages41. Leur grande efficacité et l’excellence de leur profil d’innocuité ont également été mises en évidence dans le cadre d’essais cliniques1.
Une méta-analyse a évalué l’efficacité comparative des inhibiteurs de l’IL-17 et de l’IL-23, par rapport aux anti-TNF et aux traitements administrés par voie orale, chez des patients atteints de psoriasis d’intensité modérée ou grave. Soixante et onze essais ont utilisé un critère d’efficacité qui variait de 10 à 16 semaines, alors que 11 ont utilisé un critère d’efficacité qui variait de 48 à 52 semaines. Les scores de réponse PASI 90 et PASI 100 les plus élevés de la 48e à la 52e semaine ont été observés chez les sujets traités par risankizumab, brodalumab, guselkumab et ixékizumab (Tableau 4)42.
Récemment, une méta-analyse en réseau a comparé l’efficacité des produits biologiques, du méthotrexate et du placebo en utilisant les critères d’évaluation PASI 90 ou PGA (évaluation globale par le médecin) 0 ou 1; le score PASI 75; l’amélioration selon l’indice DLQI (indice d’évaluation de la qualité de vie en dermatologie.) et la tolérabilité (définie comme le retrait du médicament en raison d’effets indésirables) entre la 10e et la 16e semaine. Comme la Figure 7 l’indique, le risankizumab est le traitement qui a été associé au meilleur profil selon ces critères43.
Les traitements biologiques ont également été comparés les uns aux autres dans le cadre d’essais comparatifs avec répartition aléatoire des sujets (Tableau 5).
Avantages des traitements biologiques au-delà de leur efficacité
Les traitements biologiques ont un meilleur profil de durabilité de l’effet thérapeutique que les traitements systémiques classiques contre le psoriasis48. Dans une étude menée en 2020 qui évaluait la durabilité de l’effet des traitements systémiques classiques (méthotrexate, ciclosporine et acitrétine) par rapport aux traitements biologiques (étanercept, adalimumab et ustékinumab) après 2 ans, la probabilité de durabilité de l’effet au 30e mois était significativement plus élevée avec les traitements biologiques qu’avec les traitements classiques (Figure 8)48.
Plus important encore, les traitements biologiques peuvent atténuer l’impact du psoriasis sur l’ECVP. De nombreux biomarqueurs de l’inflammation ont été identifiés, notamment la protéine C-réactive (CRP) et la vitesse de sédimentation des érythrocytes (VSÉ)49. Des recherches ont démontré que les concentrations de CRP sont corrélées de façon positive avec la gravité de la maladie, telle que mesurée selon le score PASI49. Les traitements biologiques réduisent l’inflammation systémique, telle que mesurée par la VSÉ et la concentration de CRP dans plusieurs états pathologiques49. Chez les patients atteints de psoriasis d’intensité modéré ou grave qui reçoivent des traitements systémiques, notamment le méthotrexate, l’adalimumab, l’étanercept, l’infliximab et l’ixékizumab, des études font état d’une réduction de la VSÉ et des concentrations de CRP49. En outre, de nombreuses études ont démontré que l’utilisation de produits biologiques permettait de réduire les symptômes de la dépression et de l’anxiété et d’améliorer la productivité au travail chez les patients atteints de psoriasis50. Dans le cadre d’une étude par observation toujours en cours, étude intitulée Psoriasis Atherosclerosis Cardiometabolic Initiative (PACI ; NCT01778569), 209 participants âgés de 37 à 62 ans ont été recrutés. De ce nombre, 124 ont reçu un traitement biologique et 85, soit les sujets qui ont formé le groupe témoin, ont reçu un traitement qui comportait uniquement des crèmes topiques et la luminothérapie. Après un an de traitement, les chercheurs ont noté une réduction de 8 % de la plaque coronaire chez les patients qui ont reçu un traitement biologique par rapport aux sujets du groupe témoin chez lesquels une légère augmentation de la progression de la plaque coronaire a été observée. Même après avoir tenu compte des facteurs de risque cardiovasculaire et de la gravité du psoriasis, une réduction de la plaque coronarienne a été observée chez les patients ayant reçu un traitement biologique51. Des travaux de recherche ont démontré le rôle potentiel d’un mécanisme pathogène commun mettant en cause le psoriasis, les maladies cardiovasculaires et le syndrome métabolique. Cette pathogenèse serait centrée sur l’IL-17A et son rôle pro-inflammatoire, et ce phénomène aurait un effet bénéfique non seulement sur les manifestations cutanées, mais aussi sur l’inflammation cardiovasculaire et les facteurs métaboliques52. Dans une étude prospective par observation menée en 2019, les chercheurs ont démontré que l’utilisation d’une thérapie biologique chez les patients atteints de psoriasis est associée à une réduction de la plaque coronaire non calcifiée et à une amélioration de la morphologie de la plaque, par rapport aux personnes qui n’ont pas reçu par un tel traitement53.

Figure 8. Durabilité de l’effet thérapeutique des traitements biologiques par rapport aux traitements classiques
UNE APPROCHE POUR RÉDUIRE L’ECVP AU MINIMUM
En résumé, une approche de type « traiter par cible » qui fait appel à un traitement très efficace permet d’atteindre l’objectif à long terme de maximiser la QdV et de réduire l’ECVP au minimum. Pour soutenir cet objectif, l’approche thérapeutique doit :
- Établir un diagnostic précoce associé à une prise en charge collaborative rapide et efficace du psoriasis
- Fixer comme cible de traitement l’élimination complète ou presque complète des lésions cutanées
- Effectuer un suivi régulier de la réponse au traitement
- Optimiser le traitement en l’absence d’une élimination complète ou presque complète des lésions cutanées
- En cas d’échec de l’optimisation du traitement, passer rapidement à un autre traitement
Lors du choix d’un agent systémique, les facteurs pertinents comprennent non seulement le potentiel d’atténuation des symptômes, mais aussi sa capacité à modifier le cours de la vie. La réponse clinique au traitement doit être évaluée régulièrement et modifiée rapidement si elle n’est pas optimale. Les cliniciens doivent retenir que les patients atteints de psoriasis qui sont les plus susceptibles de développer un ECVP sont ceux qui présentent une combinaison de facteurs cliniques et psychosociaux, notamment, mais sans s’y limiter, une présence prolongée de la maladie, une maladie plus grave, la présence de comorbidités, l’absence de soutien social et des mécanismes d’adaptation inadéquats.
Bien que le diagnostic et l’intervention précoces soient préférables, des possibilités d’interventions cliniquement significatives peuvent être utilisées à de nombreux points du parcours thérapeutique. Il n’est jamais trop tard pour se fixer des objectifs thérapeutiques ambitieux et mettre en oeuvre un plan de traitement qui vise à optimiser l’élimination des symptômes et à offrir au patient les meilleures chances d’adopter une trajectoire de vie positive.
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