À propos de l’auteur

Brittany Waller, MD
Actualité Dermatologique au Canada, Volume 2, Numéro 4, Décembre 2021
Éviter la case scalpel : le point sur le resserrement non effractif de la peau
Introduction
La consultation cosmétique est souvent l’étape initiale du parcours de vieillissement positif d’un patient. Il s’agit d’un moment où le patient peut se sentir le plus vulnérable, dépourvu de son maquillage habituel qu’il utilise pour se sentir mieux ou, en général, pour cacher les imperfections qu’il perçoit. Le patient peut être enthousiaste, nerveux ou espérer que ses objectifs esthétiques seront atteints grâce à votre aide. Les patients peuvent arriver déjà informés, ne pas savoir par où commencer ou encore vouloir la « même chose » que ce que l’ami d’un ami a obtenu en vous consultant. C’est l’expertise du médecin qui guidera à la fois la discussion et les recommandations qui seront faites. La consultation initiale permet d’établir les objectifs et les attentes du patient et constitue la base d’un plan de traitement réussi. L’observation du patient pendant qu’il discute de la ou des zones qui le préoccupent est souvent accompagnée de son auto-analyse dans le miroir, des mots qu’il associe à ce qu’il ressent ou, parfois, aux objectifs physiques précis qu’il espère atteindre. « J’aimerais juste avoir une peau un peu plus tendue », pourrait dire le patient en tirant sur son arc zygomatique et sa mâchoire. Il n’est pas surprenant pour les cliniciens expérimentés que les concepts de « lissage » et de « resserrement » sont fréquemment abordés lors de la consultation esthétique.
La découverte de méthodes efficaces de correction non effractive et peu effractive du relâchement cutanée a longtemps été un objectif insaisissable de la médecine esthétique, la demande des patients pour ce type de services ayant augmenté de plus de 600 % au cours des 15 dernières années1. Offrir des solutions aux patients en temps opportun, tout en assurant des résultats significatifs représentent souvent un défi étant donné la nature multifactorielle du relâchement. Si des facteurs métaboliques et comportementaux tels que l’âge, le tabagisme et la perte de poids peuvent y contribuer, la biologie du relâchement cutanée est un processus complexe. La diminution de l’élasticité de la peau, la résorption osseuse, l’atrophie musculaire et les modifications du tissu conjonctif sont autant de facteurs qui entraînent l’« affaissement » tant redouté. Le resserrement de la peau sans scalpel est-il encore un mythe, ou est-ce désormais une réalité?
La revue suivante présente une sélection de traitements en cabinet dont l’objectif principal est d’améliorer la laxité de la peau et de la resserrer ou la raffermir. Les lecteurs doivent noter que de nombreuses procédures et dispositifs dermatologiques peuvent indirectement contribuer au resserrement de la peau; cet article se concentrera cependant sur ceux dont ce résultat est l’objectif principal du traitement (tableau 1).

Tableau 1. Sélection de modalités non et peu effractives pour l’amélioration de la laxité cutanée; avec l’aimable autorisation de Brittany Waller, MD
Produits de comblement à base d’acide hyaluronique
S’attaquer aux déficits de volume avec de l’acide hyaluronique (AH) peut améliorer non seulement la zone de traitement, mais aussi avoir un impact positif à d’autres endroits, car la perte de volume et les proportions du visage deviennent plus équilibrées. La satisfaction de combler le milieu du visage et de constater une amélioration des creux lacrymaux, des plis nasogéniens, de la région des pommettes ou de la mâchoire est gratifiante, tant pour le patient que pour l’injecteur.
Bien que traditionnellement utilisée pour hausser le volume ou restaurer la structure perdue dans le cadre du processus de vieillissement, l’injection de microaliquote d’AH dans de larges zones du derme a récemment démontré qu’elle induisait une néocollagénèse et améliorait la turgescence et la fermeté de la peau2. La nature hydrophile de l’AH contribue également aux effets positifs sur l’élasticité, l’hydratation et la structure de la peau2. Une série de traitements permet d’obtenir un aspect plus éclatant et plus lisse de la surface de la peau2. Les effets indésirables les plus courants lors de l’utilisation de la technique d’injection de microaliquote d’AH sont les ecchymoses et les oedèmes, mais ils sont généralement minimes et bien tolérés.
Hydroxylapatite de calcium
Les microsphères d’hydroxylapatite de calcium (CaHA, Radiesse®; Merz Pharmaceuticals GmbH, Francfort, Allemagne) comprennent des particules biodégradables dans un support aqueux de gel de carboxylméthylcellulose3. Après injection, les particules induisent une réponse histiocytaire et fibroblastique, agissant comme un échafaudage pour la formation de nouveaux tissus et stimulant la production de collagène et d’élastine autour de l’implant pour une amélioration esthétique durable4.
La CaHA est approuvée pour corriger les plis/rides modérés à graves et pour traiter la perte de volume des tissus mous du visage et des mains5. Plus récemment, on a constaté que l’injection sous-dermique à l’aide de CaHA diluée améliorait la laxité de la peau sans créer d’effet volumisant4. La CaHA, un produit hautement viscoélastique, convient généralement à un placement suprapériosté, sous-cutané et dermique profond, mais elle peut être injectée superficiellement pour le rajeunissement dermique lorsqu’elle est hyperdiluée6. Lorsqu’elle est administrée sous forme de lavage sous-cutané dans la zone de traitement, la CaHA hyperdiluée est considérée comme plus biostimulante que la forme non diluée. La CaHA hyperdiluée favorise une néocollagénèse ciblée dans la zone d’injection pour améliorer la laxité et la qualité générale de la peau du milieu et du bas du visage, du cou, du décolleté, du haut des bras, de l’abdomen, du haut des jambes et des fesses. Des rapports de dilution d’au moins 1:1 pour le rajeunissement panfacial et de 1:2- 1:6 pour le cou, le décolleté et le corps sont souvent rapportés dans la documentation spécialisée4.
Les traitements sont souvent utilisés en complément d’une augmentation de volume ou combinés à d’autres modalités telles que des dispositifs à base d’énergie pour des résultats optimaux. Les effets indésirables sont les suivants : ecchymoses, gonflement, douleur et induration. Pour les peaux plus fines et plus foncées, un placement trop superficiel du produit peut entraîner des effets indésirables supplémentaires tels que la visibilité du produit et une hyperpigmentation7.
Acide poly-L-lactique
L’acide poly-L-lactique (PLLA) est un polymère synthétique biodégradable et biocompatible de la famille des alpha-hydroxy-acides8. Le PLLA a été initialement approuvé par la FDA en 2004 pour le traitement de la lipoatrophie faciale associée au virus de l’immunodéficience humaine, l’approbation pour les indications cosmétiques chez les patients immunocompétents ayant été obtenue en 20098. Sculptra® (Dermik Laboratories, Bridgewater, NJ, États-Unis) est un implant injectable disponible dans le commerce contenant des microparticules de PLLA dans une poudre de carboxyméthylcellulose et de mannitol. Après reconstitution, Sculptra® est injecté dans le derme réticulaire/ plan sous-cutané, stimulant la production de fibroblastes, entraînant ensuite la production de collagène et l’augmentation progressive du volume du visage après une série de traitements9.
La réponse de stimulation du collagène au PLLA hyperdilué a également été explorée en indication hors étiquette dans le cou, la poitrine et le corps pour le rajeunissement. Comme pour la CaHA, lorsqu’il est hyperdilué, on pense que les effets du PLLA sont plus biostimulants que volumisants par nature10. Une distribution régulière du produit est de la plus haute importance pour minimiser l’apparition de papules, de nodules et la formation de granulomes. La plupart des effets indésirables sont légers, notamment des ecchymoses, des érythèmes et des oedèmes qui disparaissent généralement en quelques jours9.
Ultrasons microfocalisés avec visualisation
Les ultrasons microfocalisés avec visualisation (MFU-V) (Ultherapy®, Ulthera Inc, Mesa, AZ, États-Unis) sont un traitement approuvé par Santé Canada pour le lissage non effractif des sourcils, du sous-menton et du cou, ainsi que pour l’amélioration des rides et ridules du décolleté11. L’imagerie par ultrasons est intégrée au protocole de traitement afin de visualiser la cible du traitement et d’évaluer le couplage correct du transducteur à la peau12.
Le traitement par MFU-V est conçu pour produire des zones microthermiques de coagulation dans le derme réticulaire moyen à profond et dans les couches fibromusculaires sous-dermiques, y compris le système musculo-aponévrotique superficiel (SMAS)12. Une réponse de cicatrisation entraînant une néocollagénèse et une contraction des tissus se produit, tout en épargnant le derme papillaire et les couches épidermiques de la peau (figure 1)12.

Figure 1. Mécanisme d’action proposé par Ultherapy®. Les ultrasons microfocalisés ciblent précisément les tissus dermiques et sous-cutanés pour créer des points de coagulation thermique (PCT), chauffant les tissus à la température optimale pour la contraction, la dénaturation et la néocollagénèse du collagène. Merz Aesthetics, www.Ultherapy.com.
Bien qu’il s’agisse traditionnellement d’un traitement de rajeunissement du visage, le traitement par MFU-V est plus récemment utilisé sur le cou, la poitrine et le corps pour favoriser un lissage de la peau léger à modéré chez le candidat approprié. Avec peu ou pas de restrictions par rapport au temps, le traitement par MFU-V est l’un des traitements non chirurgicaux de raffermissement de la peau les plus demandés. Les résultats apparaissent généralement dans les 3 à 6 mois et ne nécessitent généralement qu’un ou deux traitements, ce qui en fait une modalité intéressante pour les patients. Les effets indésirables, notamment la douleur, l’érythème, les ecchymoses et le gonflement, sont généralement transitoires et légers, ce qui en fait un excellent traitement pour le patient qui cherche à améliorer la qualité de sa peau tout en gérant un emploi du temps chargé.
Radiofréquence non effractive
L’énergie radiofréquence (RF) est une forme de courant électromagnétique pouvant être délivrée à travers divers tissus, y compris la peau, les graisses et les muscles, pour générer de l’énergie thermique13. Contrairement aux lasers qui ciblent les chromophores, la RF génère de la chaleur en raison de la résistance ou de l’impédance différente des tissus au courant électromagnétique, ce qui procure les avantages thérapeutiques souhaités12. Lorsque les RF sont appliquées à la peau et aux tissus mous, une contraction se produit en raison (1) du clivage des liaisons hydrogène dans la triple hélice du collagène, ce qui entraîne un raccourcissement et un épaississement des fibrilles de collagène et (2) de l’initiation d’une cascade de cicatrisation déclenchant la néocollagénèse, la néoanagiogénèse et la réorganisation de l’élastine au cours des 3 à 4 mois suivants1.
Alors que le premier dispositif de RF approuvé en 2002 était de nature monopolaire (ThermaCool®; Thermage Inc., Hayward, CA, États-Unis), il existe aujourd’hui des dispositifs plus sophistiqués, notamment des RF bipolaires, multipolaires et fractionnées. Thermage®, Profound® RF, Exilis® et Morpheus8® ne sont que quelques-uns des appareils disponibles sur le marché aujourd’hui. Cette technologie s’est avérée être une méthode sûre et efficace pour obtenir un resserrement des tissus mous et un lissage de la peau du cou, des mains et du corps. La technologie RF est souvent combinée à d’autres modalités, notamment le traitement par microaiguilles (INFINI®, Lutronic, Goyang City, Corée du Sud) ou par lumière pulsée intense (LPI), pour un meilleur avantage cosmétique14.
Parmi les contre-indications, citons les patients âgés à la peau mince, les maladies auto-immunes ou vasculaires du collagène, le tabagisme, les patients sous anti-inflammatoires (qui peuvent altérer le remodelage du collagène) et la présence d’un stimulateur cardiaque ou d’un autre dispositif implantable1. Outre le resserrement de la peau, les appareils à radiofréquence sont utilisés pour la réduction des graisses, et leurs indications cosmétiques continueront probablement à s’étendre à l’avenir.
Conclusions
La demande des patients pour le resserrement non effractif de la peau continuant de croître, il est fort probable que d’autres technologies et innovations voient le jour. Il est important de noter que la néocollagénèse, la réorganisation de l’élastine et l’effet de lissage ou de resserrement qui en résulte prennent du temps et nécessitent souvent une série de traitements. En fonction de la modalité utilisée, les résultats peuvent prendre de 3 à 6 mois pour se matérialiser pleinement. Par conséquent, bon nombre des procédures ci-dessus conviennent mieux aux patients qui sont correctement conseillés sur les objectifs et les attentes des résultats du traitement.
En tant que spécialistes de l’esthétique, en plus de proposer des traitements et des procédures inédits, il est également important de faire preuve de retenue lorsque cela est nécessaire. Le clinicien doit identifier les limites de chaque modalité de traitement et la sélection des patients reste de la plus haute importance. Des effets indésirables, notamment une infection, une nécrose cutanée et des cicatrices, sont possibles avec chacune des technologies. Les traitements non effractifs de raffermissement de la peau peuvent convenir aux personnes recherchant une amélioration modeste à modérée, la chirurgie restant la solution de référence dans de nombreux cas. Il est primordial de fixer des attentes réalistes pour garantir des résultats positifs, une satisfaction optimale du patient et éviter toute déception.
Références :
1. Dayan E, Burns AJ, Rohrich RJ, Theodorou S. The Use of Radiofrequency in Aesthetic Surgery. Plast Reconstr Surg Glob Open. 2020;8(8):e2861. Published 2020 Aug 17.
2. Streker M, Reuther T, Krueger N, Kerscher M. Stabilized hyaluronic acid-based gel of non-animal origin for skin rejuvenation: face, hand and decolletage. J Drugs Dermatol 2013;12:990- 4.
3. Berlin A, Cohen JL, Goldberg DJ. Calcium hydroxylapatite for facial rejuvenation. Semin Cutan Med Surg 2006;25:132-7.
4. Goldie K, Peeters W, Alghoul M, et al. Global Consensus Guidelines for the Injection of Diluted and Hyperdiluted Calcium Hydroxylapatite for Skin Tightening [published correction appears in Dermatol Surg. 2019 Feb;45(2):327]. Dermatol Surg. 2018;44 Suppl 1:S32-S41.
5. Radiesse® Infographic, Merz Aesthetics. 2017.
6. Logehm JV, Yutskovskaya YA, Weschler W. Calcium hydroxylapatite over a decade of experience. J Clin Aesthet Dermatol 2015;8:38- 49.
7. Lorenc ZP, Fitzgerald R, Vleggar D, Butterwick KJ, et al. Consensus recommendations on the use of injectable poly-L-lactic acid for facial and non facial volumization. J Drugs Dermatol 2014;13(4 Suppl):s44-51.
8. Sculptra® Infographic, Dermik Laboratories.
9. Butterwick K, Lowe NJ. Injectable poly-L-lactic acid for cosmetic enhancement: learning from the European experience. J Am Acad Dermatol. 2009;61(2):281-293.
10. Vleggaar D, Fitzgerald R, Lorenc ZP, et al. Consensus recommendations on the use of injectable poly-L-lactic acid for facial and nonfacial volumization. J Drugs Dermatol. 2014;13(4 Suppl):s44-s51.
11. Ultherapy Infographic, Merz Aesthetics.
12. Fabi SG, Massaki A, Eimpunth S, Pogoda J, Goldman MP. Evaluation of microfocused ultrasound with visualization for lifting, tightening, and wrinkle reduction of the décolletage. J Am Acad Dermatol. 2013;69(6):965-971.
13. Greene RM, Green JB. Skin tightening technologies. Facial Plast Surg. 2014;30:62-67.
14. Weiner, S.F. (2013). A Review of Radio Frequency for Skin Tightening by Dr . Steven Weiner (Finally! A Radiofrequency System That Makes Sense: The Infini From Lutronic).