À propos de l’auteur

Parbeer Grewal, MD
Le Dr Grewal est directeur médical du Rejuvenation Dermatology and Aesthetics, situé au centre-ville d’Edmonton. Il est également professeur clinicien agrégé à la Division de dermatologue de l’Université de l’Alberta. Il a obtenu son diplôme de premier cycle à l’Université de l’Alberta et a aussi obtenu son doctorat en médecine et sa formation en dermatologie à l’Université de l’Alberta. Il est également médecin consultant pour l’hôpital de l’université d’Alberta, l’hôpital Royal Alexandra, l’hôpital des Sœurs grises et l’hôpital Misericordia. Le Dr Grewal a participé à plus de 60 essais de recherche clinique portant sur une multitude de maladies de la peau et de médicaments. Le Dr Grewal siège également à de nombreux conseils consultatifs scientifiques nationaux et internationaux, est un éminent pair-examinateur pour les revues médicales et a publié des articles de revues et des chapitres de livres en dermatologie.
Supplément Spécial, Actualité Dermatologique au Canada, Août 2021
Tildrakizumab Chez Les Patients Atteints D’un Syndrome Métabolique : Une Approche Novatrice
Le tildrakizumab est un anticorps IgG1 k humanisé et de haute affinité. Il cible l’interleukine 23 p19 pour traiter les patients atteints de psoriasis en plaques chronique1. En mars 2018, la FDA (l’office de réglementation des aliments et des médicaments aux États-Unis) a homologué l’utilisation de l’ILUMYATM (tildrakizumab-asmn) pour le traitement des adultes atteints de psoriasis en plaques d’intensité modérée ou grave qui sont des candidats à un traitement systémique ou à la photothérapie. Ce traitement a également été homologué en Australie, au Japon et dans de nombreux pays européens. La dose recommandée d’ILUMYATM qui a été homologuée aux États-Unis est de 100 mg par injection sous-cutanée, aux semaines 0 et 4, puis toutes les 12 semaines par la suite2. Au Canada, le tildrakizumab n’a pas encore été homologué pour le traitement des patients atteintes de psoriasis en plaques d’intensité modérée ou grave.
Le présent article étudie le cas fictif d’un patient qui pourrait être un bon candidat au traitement par tildrakizumab et fournit une justification sous-jacente au choix du traitement pas tildrakizumab dans ce scénario clinique.
Un homme de 39 ans, atteint de psoriasis de grave intensité, se présente à votre cabinet pour une nouvelle consultation. Il est atteint de psoriasis depuis 6 ans. Tous les traitements topiques et les traitements systémiques administrés par voie orale ont été des échecs. Ses antécédents médicaux sont significatifs, notamment l’obésité, l’hypertension et la tolérance au glucose à jeun. Les médicaments qu’il prend actuellement comprennent une multivitamine et un inhibiteur des récepteurs de l’angiotensine. Ses antécédents familiaux sont significatifs et comprennent notamment obésité, hypertension, diabète et infarctus du myocarde. Il se déplace assez fréquemment pour son travail et ne peut donc pas s’engager dans un programme de photothérapie. Dans le choix d’une thérapie biologique, la nouvelle classe d’agents anti-IL23p19 présente 10 caractéristiques cliniques distinctes qui pourraient s’avérer bénéfiques pour ce type de patient.
Fréquence des injections et réactions au point d’Injection
L’intervalle entre les injections est plus long avec des agents anti-IL23p19, comme le risankizumab et le tildrakizumab, et de agents anti-IL12/23, comme l’ustekinumab. Dans tous les cas, les doses sont administrées aux semaines 0 et 4, puis toutes les 12 semaines par la suite2-4. De plus, les agents anti-IL23p19 ont une incidence plus faible de réactions au point d’injection (< 0,5 %) que les agents comme l’ixékizumab (7,7 à 10 % dans UNCOVER-3) et l’adalimumab5,6.
Efficacité
Les agents anti-IL23p19 ont des taux élevés d’efficacité clinique et de durabilité. Dans reSURFACE 1 et reSURFACE 2, avec une dose de tildrakizumab, à raison de 100 mg, jusqu’à 64 % des patients ont obtenu un score PASI 75, 35 % un score PASI 90, 14 % un score PASI 100 et 59 % un score PGA (amélioration selon l’évaluation globale par le médecin) de 0 ou 1 à la 12e semaine après avoir reçu 2 doses du médicament7. Avec le temps, la durabilité des réponses au traitement par tildrakizumab demeure très stable, puisque la plupart des patients maintiennent leurs réponses et que d’autres atteignent un niveau encore plus élevé de clairance du psoriasis. À 148e semaine, 72,6 % des patients traités tildrakizumab, à raison d’une dose de 100 mg, ont obtenu un score PASI 75, alors que 53,8% ont obtenu un score PASI 90 et 28,9 % un score PASI 100 Ces résultats sont comparables à ceux obtenus avec d’autres agents anti-IL23p19 et anti-IL175.
Effets cardiométaboliques
Les patients présentent un degré plus élevé d’obésité (RR = 1,8), hypertension (RR = 1,58), diabète (RR = 1,76) et de dyslipidémie
(RR = 1,04 to 5,55)8. Le psoriasis grave peut aussi, de lui-même, peut conférer une augmentation de 6,2 % du risque absolu de développer des effets cardiovasculaires indésirables majeurs (ECIM), par rapport à la population générale9. Tous ces facteurs combinés augmentent considérablement le risque d’effets cardiaques et cérébrovasculaires indésirables, ce qui est associé à une morbidité et une mortalité beaucoup plus importantes chez les patients atteints de psoriasis.
Le problème avec l’utilisation d’un traitement biologique dans ce groupe de patients est que le syndrome métabolique lui-même peut réduire la réponse du patient à ces agents biologiques, ce qui se traduit par des réponses PASI plus faibles et une plus grande défaillance à long terme du médicament10. Cependant, l’efficacité du traitement par tildrakizumab a été la même, sans égard à la présence d’un syndrome métabolique préexistant. Dans les études sur le tildrakizumab, les patients atteints du syndrome métabolique présentaient généralement un poids corporel, un IMC, et un risque de maladie cardiovasculaire et de diabète sucré plus élevés que les patients sans syndrome métabolique. L’efficacité des doses de 100 et 200 mg de tildrakizumab a été maintenue pendant les 148 semaines de l’étude, sans que l’on constate une réduction de la survie au médicament chez les patients atteints du syndrome métabolique11-14.
Des études récentes sur l’utilisation de la thérapie biologique ont cherché à élucider la relation entre la réduction de l’inflammation systémique et, par extension, l’atténuation des manifestations cardiométaboliques associées au psoriasis non traité. Les conclusions d’une étude qui ont été publiées récemment dans JAMA Cardiology, qui a suivi des patients atteints de psoriasis de 2013 à 2019, a analysé 134 patients (82 sous traitement biologique et 52 sous thérapie cutanée). Les chercheurs ont mesuré l’inflammation coronaire à l’aide de l’angiographie par tomodensitométrie pur évaluer l’indice de réduction de la masse grasse. Une plus grande amélioration des scores PASI a été observée chez les patients sous traitement biologique. Par ailleurs, ces patients étaient les seuls à présenter une réduction du score CRP à haute sensibilité (HS-CRP), selon l’indice de réduction de la masse grasse15. D’autres résultats publiés en 2019 par Elbanawi, et al, portant sur 121 patients qui n’avaient jamais reçu de traitements biologiques au départ (89 traitements biologiques, 32 traitements topiques ou légers) et à 1 an de suivi, ont permis de constater une réduction de 5% de l’accumulation de plaque coronaire dans le groupe de sujets traités par agents biologiques16.
Un article publié récemment par Mehta (2019) fait état de baisses numériques cliniquement pertinentes du taux de glucose à jeun, des triglycérides et de la pression artérielle systolique au fil du temps, chez les patients traités par le tildrakizumab17. Une extrapolation prudente laisse entendre que l’utilisation au traitement par tildrakizumab pourrait être efficace, quel que soit le statut du syndrome métabolique sous-jacent. L’étude menée par Lebwohl, et al., (2020) est parvenue à une conclusion similaire après une analyse a posteriori des essais reSURFACE 1 et reSURFACE 2 qui indique que l’efficacité, l’innocuité et la survie médicamenteuse de tildrakizumab étaient comparables dans le traitement des patients atteints de psoriasis, sans égard au syndrome métabolique sous-jacent18.
Une étude présentée récemment dans le cadre du 28e congrès de l’Académie européenne de dermatologie et de vénérologie (EADV) a illustré les avantages du tildrakizumab chez les patients atteints de psoriasis et d’un syndrome métabolique comorbide. En trois ans, une clairance cutanée de 75 à 100 % a été atteinte et maintenue de manière égale chez les patients avec, tout autant que chez ceux atteints d’un syndrome métabolique. Le syndrome métabolique est déterminé par une pression artérielle, un indice de masse corporelle ou d’obésité et des taux de triglycérides ou de glucose élevés et un faible taux de cholestérol HDL19.
Dans reSURFACE 1, 69 % et 71 % des patients avec et sans syndrome métabolique avaient obtenu respectivement un score PASI 75, 42 % et 51 % des patients avec et sans syndrome métabolique avaient obtenu respectivement un score PASI 90, et 27 % et 23 % des patients avec et sans syndrome métabolique avaient obtenu respectivement un score PASI 100 à la 12e semaine.
Dans le resurfaçage, 2, 73 % et 79 % des 11 patients avaient obtenu respectivement le score PASI 75; 57 % et 60 % avaient obtenu respectivement le score PASI 90; et 34 % et 32 % avaient obtenu respectivement le score PASI 100 à la semaine 125.
Dans le cas de notre patient fictif, on pourrait avoir confiance en l’utilisation d’un agent qui agit malgré la présence du syndrome métabolique et qui permet peut-être de réduire du même coup les facteurs de risque.
Innocuité
Sur une période de 148 semaines de traitement, les taux de manifestations indésirables apparues en cours de traitement par tildrakizumab, à raison de 100 mg, par tildrakizumab, à raison de 200 mg, par placebo ou par étanercept étaient respectivement 35,2, 37,2, 148,6 et 148,6 manifestations par 100 années-patients. Les manifestations indésirables les plus fréquentes ont été la nasopharyngite, l’infection des voies respiratoires supérieures, la grippe, la bronchite et la sinusite. Dans l’ensemble, les taux d’infections graves, de tumeurs malignes et d’effets cardiovasculaires indésirables majeurs associés au traitement par tildrakizumab ont été faibles sur une période de 148 semaines. Les manifestations indésirables étaient toutes comparables à celles associées au placebo et aucune nouvelle manifestation indésirable ou manifestation inattendue n’a été observée concernant les infections à levure, l’exacerbation de la maladie intestinale inflammatoire, les idées ou comportements suicidaires ou tout autre manifestation indésirable émergente5.
Récapitulatif
En conclusion, le traitement par tildrakizumab est efficace, durable et sans danger. Il est par ailleurs associé à une fréquence d’injection pratique. Des données solides laissent entendre que le traitement par le tildrakizumab est efficace chez les personnes atteintes d’un syndrome métabolique et qu’il peut réduire le risque de maladie métabolique elle-même, ce qui améliore l’issue du traitement pour les patients. Compte tenu de ces facteurs, notre patient pourrait grandement bénéficier d’un traitement par tildrakizumab.
References
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